Israël lance une offensive dans la bande de Gaza

Publié le par Alternatifs06 pays de Grasse

Jérusalem, correspondant  (Le Monde du 29-12-08)

Israël est de nouveau en guerre. Deux ans et demi après la seconde guerre du Liban contre le Hezbollah, au cours de l'été 2006, l'Etat juif a lancé, samedi 27 décembre, une offensive aérienne surprise contre la bande de Gaza qui se poursuivait lundi, causant la mort d'au moins 310 personnes en quarante-huit heures et faisant plus de 1 400 blessés, selon des sources médicales palestiniennes. Les hôpitaux de la bande de Gaza ont été submergés et se sont trouvés la plupart du temps dans l'incapacité de prodiguer les soins d'urgence aux arrivants, qui ont succombé sur place. Les médicaments manquent. Les morgues débordent.

 Selon l'Office de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), au moins 115 blessés se trouveraient dans un état critique. Pour la seule journée de samedi, 64 avions, en différentes vagues, ont tiré des centaines de missiles, soit plus de 100 tonnes d'explosifs.

L'armée israélienne a indiqué que 230 objectifs ont été visés : casernes, centres d'entraînement, sites de lancement de roquettes, dépôts de munitions, siège du gouvernorat, mosquées, studio de la télévision du Hamas, immeuble du conseil des ministres, postes de police, ministère de l'intérieur, université islamique de Gaza. Toute l'infrastructure militaire et politique – voire religieuse – du Mouvement de la résistance islamique a été la cible des F-16 et des drones. Des dizaines de raids aériens ont été menés dans la nuit de dimanche à lundi. Quatre fillettes de 1 à 12 ans ont été tuées lors du bombardement d'une mosquée à Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza, et deux autres enfants ont péri dans le sud, à Rafah.

D'après un bilan établi par OCHA, la plupart des victimes sont des policiers du Hamas. Une trentaine d'entre eux ont été fauchés, samedi matin, dans la cour d'une caserne lors d'une remise de diplômes par le chef de la police, qui a aussi été tué. Mais au moins 26 enfants, 9 femmes et une soixantaine de civils sont morts. Dimanche, la bande de Gaza n'en finissait pas d'enterrer ses victimes. Des cortèges gigantesques se sont formés dans les principales villes du territoire.


"RENVOYER LA BANDE DE GAZA DES DÉCENNIES EN ARRIÈRE EN TERMES DE CAPACITÉ MILITAIRE"

L'opération a été baptisée "Plomb durci". Elle est destinée à "renvoyer la bande de Gaza des décennies en arrière en termes de capacité militaire, en faisant le maximum de victimes chez l'ennemi et le minimum au sein des forces armées israéliennes", a expliqué le général Yoav Galant, commandant de la région sud. Il s'agit de réduire le plus possible tous les moyens des lanceurs de roquettes et d'obus de mortier et toutes les velléités de poursuivre les tirs en direction du territoire israélien.

Pour le moment, ces tirs n'ont pas cessé. Cent cinquante ont été dénombrés en deux jours. Ils ont fait une victime, samedi, dans la petite ville de Netivot. Et pour la première fois, une roquette de type Grad a explosé, dimanche, à proximité du port d'Ashdod, à plus de 30 kilomètres de la frontière avec la bande de Gaza.

Cela démontre que les capacités de réplique du Hamas sont, pour l'instant, loin d'avoir été annihilées et que sa branche armée, Ezzedine Al-Qassam, ainsi que le Djihad islamique, disposent de projectiles de plus en plus performants. C'est pourquoi l'opération "Plomb durci" ne fait que commencer.

"Tsahal élargira et approfondira ses opérations à Gaza autant qu'il sera nécessaire", a prévenu Ehoud Barak, ministre de la défense. "Nous devons savoir que cela prendra du temps et que ce ne sera pas facile", a-t-il convenu. Des unités de chars ont été massées en différents points de la frontière; 6 500 réservistes ont été rappelés.

Une opération terrestre d'envergure se prépare-t-elle ? Ou va-t-il s'agir d'opérations ponctuelles en bordure de la bande de Gaza pour "nettoyer" les sites de lancement de roquettes ? Ce qui est sûr est qu'Israël n'a pas l'intention de réoccuper ce territoire. L'Etat juif n'a pas non plus la possibilité de renverser le régime du Hamas, en dépit des intentions clairement exprimées par la ministre des affaires étrangères israélienne, Tzipi Livni.

Les moyens à mettre en œuvre pour mener à bien une telle opération sont considérables et sans véritables garanties de résultat. Le fiasco de la seconde guerre du Liban est encore dans toutes les mémoires. Après trente-quatre jours de conflit, Tsahal n'est jamais parvenu à empêcher les tirs de roquettes du Hezbollah, qui se sont poursuivis jusqu'au dernier jour.

Dans quelle mesure l'opération lancée dans la bande de Gaza va-t-elle permettre de faire cesser les tirs en direction d'Israël, ce qui reste l'objectif premier de cette attaque sanglante ? Toujours est-il que les Israéliens ont frappé vite et très fort. La violence de cette réplique et le nombre élevé de victimes sont sans précédent sur ce territoire depuis la guerre des six jours en 1967.


"HOLOCAUSTE AU VU ET AU SU DU MONDE ENTIER"

Fawzi Barhoum, porte-parole du Hamas, a accusé Israël de "commettre un holocauste au vu et au su du monde entier". Khaled Mechaal, chef du bureau politique en exil à Damas, a appelé à "une troisième Intifada contre l'ennemi". Des manifestations spontanées de protestation ont eu lieu dans la plupart des villes de Cisjordanie. Un manifestant a été tué par les forces de sécurité israéliennes. La police palestinienne a dispersé sans ménagement un rassemblement à Hébron.

Pendant deux jours, tous les commerces palestiniens ont été fermés en signe de deuil. Des heurts se sont produits dans de nombreuses villes : jets de pierre, grenades lacrymogènes, poubelles en feu. L'indignation et la révolte grondent face à ce que les Palestiniens considèrent comme un "carnage" et que la plupart des Israéliens trouvent justifié et nécessaire pour mettre un terme aux tirs en provenance de la bande de Gaza. Seule une petite manifestation de 1 000 protestataires a eu lieu samedi soir à Tel-Aviv. "Personne ne peut prétendre qu'un massacre contre les Gazaouis va permettre de protéger les habitants de Sderot et d'Ashkelon", a affirmé un étudiant.

"Nous ne combattons pas le peuple palestinien mais le Hamas", a assuré Ehoud Olmert, premier ministre de transition, affirmant que l'aviation "réduit au maximum les victimes innocentes". "Le Hamas est une organisation terroriste et personne n'est à l'abri", a fait valoir Tzipi Livni, assurant qu'il fallait à tout prix rétablir le calme pour les 250000 habitants israéliens de la périphérie de la bande de Gaza.

Le gouvernement a estimé qu'il avait été assez patient et que la pluie de roquettes qui s'est abattue sur le sud d'Israël depuis la fin de la trêve, le 19 décembre, ne pouvait plus être tolérée. "Il y a un temps pour le calme et un autre pour le combat : le temps de combattre est venu", a insisté Ehoud Barak.

Dimanche, l'aviation israélienne a bombardé une quarantaine de tunnels creusés sous la frontière égyptienne, qui constituent le seul cordon ombilical de la bande de Gaza avec l'extérieur puisque le territoire est hermétiquement bouclé par l'Etat juif. Ces raids ont fait 2 morts et 22 blessés. L'armée estime que ces galeries sont une source importante d'approvisionnement en armes et en munitions pour le Hamas. Elles permettent aussi de faire passer de la nourriture.

Afin de tenter de sortir de la nasse dans laquelle ils sont enfermés, les Gazaouis sont parvenus à démanteler sur plusieurs points le mur qui clôt la frontière avec l'Egypte sur 14 kilomètres. Des heurts se sont produits avec les forces de sécurité égyptiennes. Un policier a été tué. Le Hamas reproche à l'Egypte de maintenir fermé le point de passage de Rafah, seule porte de sortie pour les habitants de la bande de Gaza.

Michel Bôle-Richard

Publié dans International

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P
merci pour ces infos, autre chose que la soupe servie sur les chaînes nationales, avec des journalistes muselés, qui ne q'appeleront bientôt plus "journalistes", mais "service pub du gouvernement".
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